Vu les développements récents de l’actualité, je fais un intermède dans ma série sur les ailes jeunesse.
Envoye les enfants ! Mettez vous en rond, mettez-vos bonnâts (bonnet, en langue du Lac), prenez-vous deux gravols pis une tite ponce de gin chaud (z‘avez pas le droit de mettre du miel dedans, à moins d’avoir la grippe) pis ouvrez ben grand vos oreilles, parce que moé, Ti-Claude le radoteux, vrâ comme chu là, j’m’en vas vous raconter la légende de l’article 1 du PQ.
Non, mais c’est vrai ! Je visite les blogues, j’écoute les journalistes, j’entends Josée Legault (qui connaît pourtant bien le parti), je vois les libéraux et les adéquistes réagir et tout le monde à cette phrase, prononcée avec gravité : « Le PQ renonce à son article 1! »
Pourtant, je le sais pas pour vous autres, mais moi, ça va faire dix ans bien vite que je suis au PQ, pis l’article 1, moi, je l’ai jamais vu ! Oui, oui ! Je vous le dis ! Je le cherche, pis je le trouve pas !
Ça me fait penser à cet épisode des Simpsons où Homer se joint à une société secrète, « les Tailleurs de pierres », pastiche des Francs-Maçons. Les membres de ce club vénèrent un parchemin sur lequel leur loi fondamentale est écrite. Évidemment, Homer finit par y mettre feu, par accident. Le groupe se rebaptise alors le « club des pas d’Homer ». Mais ça, c’est une autre histoire.
Les gens, Stéphane Dion au premier chef, ont l’air de penser que les péquistes se réunissent pour se prosterner autour d’un document qui contient vingt ou trente articles, fixant les dogmes du PQ. Si au moins c’était ça, on ne serait pas pogné, congrès après congrès, avec un document illisible de 100 pages comme programme…
La vérité, c’est qu’il n’existe pas l’article 1. Ben oui, c’est vrai, c’est un mythe.
Il y a un programme par contre, lequel est divisé en chapitres. Traditionnellement, le CHAPITRE 1 est consacré à la souveraineté. (Haaaaaaa……….) Ce chapitre comprend l’argumentaire souverainiste officiel du parti, il prévoit les mesures de promotion que nous comptons mettre en branle et (voooooooilà!) le cadre stratégique par lequel nous pensons faire du Québec un pays.
Ce programme, depuis sa refonte en 2005 suite à la Saison des idées, nous engage à tenir un référendum dans la première partie d’un premier mandat du PQ. Cette position est en fait exorbitante de notre position traditionnelle. En effet, le PQ ne s’est présenté en élections que trois fois en promettant un référendum : 1976 (résultat : défaite référendaire), 1994 (résultat : défaite référendaire) et 2007 (résultat : défaite électorale historique). Hmmm… pour moi, c’est pas une bonne stratégie, on dirait…
La vérité, c’est que le PQ a décidé de passer à autre chose. Il a décidé de cesser de rêver d’une revanche référendaire. Il a décidé de faire de la souveraineté.
En somme, c’est un retour à l’ère pré-référendaire. Prendre le pouvoir, gouverner le Québec, mais pas comme une province, mais bien comme ce que nous pensons qu’il devrait être, c’est à dire, un pays. Parce que refuser de prendre le pouvoir sans gouverner nous mène à l’échec électoral. Mais surtout parce qu’accepter de gouverner la « province » nous mène à la médiocrité collective.
« Mais oui, mais Claude, « l’article 1 », c’est une métaphore. Ça veut dire que le PQ renonce à son enjeux fondamental. » Ben non, justement. C’est pas vrai. Le PQ a décidé d’arrêter d’attendre le référendum pour faire des gestes pour faire grandir la liberté du Québec. C’est tout. Heille ! On a une obligation de résultats ! Le mandat de 1976 mis à part, à chaque fin de terme du Parti Québécois, le Québec était moins puissant qu’au début. Ça ne vous allume pas une lumière vous autres ? Peut-être que ce serait le temps qu’on réagisse !
Le 30 octobre 1995, j’ai vu les boomers rentrer chez eux, le sourire aux lèvres : « 49.4% ! On n’a jamais été aussi proche ! C’est pour dans pas longtemps ! » Ben oui. C’est ça. À moins d’un référendum d’ici 2010, le temps écoulé entre ceux de 80 et de 95 sera plus court que celui de 95 et le suivant.
Ça fait bientôt 15 ans qu’on se demande comment on pourrait faire pour atteindre 50% + 1 dans la prochaine année. Imaginez si, à la place, en 1995, on se serait demandé comment faire pour atteindre 65 % en 2005. On n’aurait probablement pas reculé sur l’enjeux linguistique. On n’aurait pas démissionné de l’enjeux identitaire. On n’aurait pas niaisé devant les tribunaux pour régler la question des congés parentaux. On n’aurait probablement pas vécu l’incurie Boisclairienne.
On aurait gouverné comme des souverainistes, en fait. Et on n’en serait pas où nous en sommes, au bord de la disparition, confiné au rang de 3e formation politique au Québec.
Alors voilà, pour la légende de l’article 1. La vérité, c’est qu’il n’a jamais existé l’article 1. Et que, enfin, le PQ en a un article 1 : sortir d’une logique du « tout ou rien » pour entrer dans une logique du « toujours plus ». C’est le chemin le plus direct vers l’indépendance.
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